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Publication sur la lutte contre l’étalement urbain (et vœux!)

Jurisprudence, Nouveau texte, Urbanisme

Bonne année 2021 à tous! Santé, sérénité, bonheur et réussite dans vos projets, en espérant que la crise sanitaire ne soit bientôt qu’un mauvais souvenir. Côté pouvoirs publics, je formule un vœux de cohérence entre les belles déclarations et les actes. Exemple : la réduction des contrats d’achat dans le photovoltaïque, un coup dur porté à la filière, au mauvais moment. Autre exemple, la mise en œuvre des conclusions de la Convention Citoyenne sur le Climat (CCC), essentiellement déclinées à travers le projet de loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » dévoilé le 8 janvier par le gouvernement. De nombreuses voix s’élèvent déjà pour dénoncer des ambitions largement revues à la baisse, malgré la promesse présidentielle, notamment dans le domaine de la rénovation thermique des bâtiments.

Après avoir publié un extrait (sur LinkedIn), nous souhaitons partager avec vous notre article sur la lutte contre l’étalement urbain et l’objectif ZAN (« Zéro Artificialisation Nette ») publié au Moniteur fin novembre 2020 (1). Il nous faut également compléter le propos en évoquant, ci-après, les avancées du « projet de loi CCC » en la matière, ainsi qu’un récent arrêt du Conseil d’Etat sur le champ d’application de la séquence ERC (éviter, réduire, compenser) (2).

1) Notre article intitulé « La lutte contre l’étalement urbain en quête d’outils efficaces ». « Zéro artificialisation nette, séquence ERC, tiers demandeur… Les dispositifs existants sont en deçà des enjeux d’une ville dense et compacte. » (Moniteur, 27.11.20) (pdf)

2) Mise à jour sur le sujet ZAN et ERC

Le projet de loi « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » devrait être présenté en Conseil des ministres le 10 février 2021 pour un début de discussion fin mars à l’Assemblée nationale, en procédure accélérée (une seule lecture devant chaque chambre). Sous réserve d’évolutions prévisibles lors des débats parlementaires, sur la lutte contre l’artificialisation des sols (chapitre III du projet de loi, art. 46 à 55), il prévoit en substance :

  • D’ici 2030, objectif de diviser par deux la consommation d’espace réelle observée sur les dix dernières années. Objectif décliné dans les documents d’urbanisme à tous les niveaux (régional, intercommunal et communal, par un lien de compatibilité)
  • Insertion de la lutte contre l’artificialisation des sols dans les principes généraux du droit de l’urbanisme et définition de la notion d’artificialisation
  • Dispositions transitoires pour intégrer l’objectif dans les documents de planification existants, du SRADDET au PLU. Nouvel objectif du PADD (projet d’aménagement et de développement durables, intégré au plan local d’urbanisme) : il ne peut prévoir l’ouverture à l’urbanisation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers que s’il est justifié que la capacité de construire ou d’aménager est déjà mobilisée dans les espaces déjà urbanisés.
  • Rapport annuel par chaque commune ou intercommunalité rendant compte de l’artificialisation des sols
  • Sauf exception, interdiction de délivrer une autorisation d’exploitation commerciale pour une implantation ou une extension qui engendrerait une artificialisation des sols. Dérogations exceptionnelles possibles pour les surfaces de vente inférieures à 10.000 m² suivant cinq conditions. A préciser par décret.
  • Inventaire des zones d’activités économiques
  • A partir de 2023, toute demande de permis de construire devra faire l’objet d’une étude du potentiel de réversibilité et d’évolution future
  • Habilitation du gouvernement à légiférer par ordonnance pour renforcer les règles d’urbanisme visant à lutter contre l’étalement urbain
  • Mise en place d’une stratégie nationale des aires protégées, lesquelles doivent couvrir (à un horizon indéterminé) 30% du territoire national et des espaces maritimes sous juridiction nationale
  • Renforcement du droit de préemption dans les espaces naturels sensibles

Devant ces nouvelles mesures, on constate que l’objectif Zéro Artificialisation ne devient pas un principe général et absolu en matière d’urbanisme et d’aménagement, mais une tendance mieux affirmée et structurée, en particulier au niveau de l’urbanisme commercial – mais pas des entrepôts. D’autres mesures récentes et importantes participent à cet objectif ZAN : la loi de finances 2021, adoptée le 17 décembre 2020, adapte la taxe d’aménagement pour lutter contre les espaces de stationnement extérieurs et favoriser la densification.

Enfin, on peut signaler un arrêt intéressant précisant le champ d’application de la séquence ERC (éviter, réduire, compenser), une notion voisine du ZAN dans ses effets. Dans un arrêt du 30 décembre 2020 (n° 432539, Association Koenigshoffen Demain), le Conseil d’Etat précise que le principe ERC doit être appliqué à chaque fois qu’un projet est soumis à étude d’impact (ou évaluation environnementale au sens de l’art. R.122-2 c. env.).

Selon le résumé du Conseil d’Etat :

Il résulte de l’article L. 424-4 du code de l’urbanisme, d’une part, et des articles L. 122-1, R. 122-2 et R. 122-14 du code de l’environnement, d’autre part, que, lorsque le projet autorisé par le permis de construire est soumis à une étude d’impact en application du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, notamment des lignes 36° et 37°, le permis de construire doit, à peine d’illégalité, être assorti, le cas échéant, des prescriptions spéciales imposant au demandeur, en plus de celles déjà prévues par la demande, les mesures appropriées et suffisantes pour assurer le respect du principe de prévention, destinées à éviter, réduire et, lorsque c’est possible, compenser les effets négatifs notables du projet de construction ou d’aménagement sur l’environnement ou la santé humaine (mesures dites ERC) et, d’autre part, les mesures de suivi, tant des effets du projet sur l’environnement que des mesures destinées à éviter, réduire et, lorsque c’est possible, compenser ces effets. Par suite, la méconnaissance de l’article R. 122-14 du code l’environnement peut être utilement invoquée à l’encontre du contenu d’un permis de construire délivré pour des travaux soumis à étude d’impact.

Sources :

> mon article sur la lutte contre l’étalement urbain (nov. 2020)

> projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

> exposé des motifs du projet de loi

> sur le projet de loi de finances, art. 43

> CE, 30 décembre 2020, Association Koenigshoffen Demain, n° 432539