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Déclaration d’utilité publique et principe de précaution, le Conseil d’Etat valide le projet de ligne THT « Contentin – Maine »

Charte, Jurisprudence

Par un arrêt d’assemblée du 12 avril 2013, le Conseil d’Etat a validé la légalité de la déclaration d’utilité publique de la ligne THT « Cotentin-Maine » au regard du principe de précaution (art. 5 de la Charte de l’environnement et L. 110-1 du code de l’environnement). Le considérant de principe, d’une grande précision, énonce (point 37) :

Considérant qu’une opération qui méconnaît les exigences du principe de précaution ne peut légalement être déclarée d’utilité publique ;

qu’il appartient dès lors à l’autorité compétente de l’Etat, saisie d’une demande tendant à ce qu’un projet soit déclaré d’utilité publique, de rechercher s’il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l’hypothèse d’un risque de dommage grave et irréversible pour l’environnement ou d’atteinte à l’environnement susceptible de nuire de manière grave à la santé, qui justifierait, en dépit des incertitudes subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l’état des connaissances scientifiques, l’application du principe de précaution ;

que, si cette condition est remplie, il lui incombe de veiller à ce que des procédures d’évaluation du risque identifié soient mises en oeuvre par les autorités publiques ou sous leur contrôle et de vérifier que, eu égard, d’une part, à la plausibilité et à la gravité du risque, d’autre part, à l’intérêt de l’opération, les mesures de précaution dont l’opération est assortie afin d’éviter la réalisation du dommage ne sont ni insuffisantes, ni excessives ;

qu’il appartient au juge, saisi de conclusions dirigées contre l’acte déclaratif d’utilité publique et au vu de l’argumentation dont il est saisi, de vérifier que l’application du principe de précaution est justifiée, puis de s’assurer de la réalité des procédures d’évaluation du risque mises en oeuvre et de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation dans le choix des mesures de précaution ;

Au cas présent, le Conseil d’Etat a jugé que le principe de précaution trouvait à s’appliquer compte tenu du risque accru, jugé plausible, de leucémies infantiles à une distance de 0 à 100 mètre de la ligne (exercice d’un contrôle dit normal).

Mais il a relevé que les mesures de précaution prises par le ministre de l’écologie n’étaient pas « manifestement insuffisantes » au regard du risque (dispositif de surveillance et de mesure des ondes électromagnétiques, engagement de procéder au rachat des habitations situées à moins de 100 m de la ligne). Le contrôle du juge est donc restreint sur ce point.

A l’issue de ce contrôle préalable, qui souligne l’importance du principe de précaution dans notre ordre juridique, le Conseil s’est livré à une classique mise en oeuvre de la théorie du bilan pour apprécier l’utilité publique de l’opération (cf. jurisprudence Ville Nouvelle Est, CE Ass. 28 mai 1971).

Les différents inconvénients sont ainsi mesurés à l’aune de l’intérêt public présenté par le projet. Au titre des inconvénients pour la santé publique, c’est le risque résiduel tel que corrigé par les mesures de précaution qui est retenu. Sur ce point, le Conseil a rappelé que la ligne THT devait transporter l’électricité produite par la centrale EPR en cours de construction à Flamanville (Contentin). Il a retenu sans hésiter que l’intérêt public lié au fonctionnement du réseau électrique associé à cette centrale « Flamanville 3 » prévalait sur les inconvénients constatés.

> CE Ass., 12 avril 2013, Association Coordination interrégionale stop THT et autres, n° 342409