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PLU et sites pollués, quelle marge de manœuvre pour le maire?

Déchet, Installation classée, Pollution chimique, Urbanisme

Une question parlementaire rappelle l’état du droit en la matière : le classement d’un site pollué en zone constructible n’est pas nécessairement illégal.  L’appréciation doit être faite au cas par cas et seule une erreur manifeste d’appréciation justifie l’annulation du choix de zonage. A noter que le ministre soutien par erreur que la police des déchets peut être mise en oeuvre par le maire pour mettre en demeure le producteur ou le détenteur des déchets de dépolluer le site. On a rappelé récemment que ce n’était plus possible (ici).

Question écrite n° 17964 de M. Yves Détraigne (Marne – UCR) – JO Sénat du 07/04/2011 – page 855

M. Yves Détraigne attire l’attention de M. le secrétaire d’État chargé du logement sur la procédure de révision du plan local d’urbanisme (PLU).
Il a en effet été saisi par un maire, à la suite de la demande d’un administré souhaitant voir son terrain reclassé en « terrain constructible », alors même que cette parcelle a eu des antécédents industriels non négligeables.
Cet espace a ainsi été occupé par une scierie-menuiserie, une extraction de grève et une entreprise de maçonnerie, et les sondages réalisés indiquent la présence de divers remblais sous une couche de terre végétale.
Le premier magistrat se demande si le fait de reclasser éventuellement ce terrain en zone constructible au cours d’une future révision du PLU, tout en connaissant l’historique de ladite parcelle, ne constituerait pas une faute.
Il lui demande donc de bien vouloir l’éclairer sur ce point.

Réponse du Secrétariat d’État chargé du logement – JO Sénat du 15/12/2011 – page 3226

Aux termes de l’article L. 121-1 du code de l’urbanisme, les plans locaux d’urbanisme (PLU) doivent déterminer les conditions permettant d’assurer la prévention des pollutions et des nuisances de toute nature. Toutefois, le contrôle exercé par les juridictions sur le classement de terrains pollués en zone constructible se limite au contrôle de « l’erreur manifeste d’appréciation », c’est-à-dire aux erreurs graves et évidentes dans le choix du zonage, notamment au regard des éléments dont la commune disposait le jour où elle a adopté le PLU. La présence par le passé d’installations industrielles ou d’usines n’implique en effet pas nécessairement une pollution. Une analyse au cas par cas est à chaque fois nécessaire et en cas de suspicion de pollution la commune devra faire réaliser les expertises nécessaires avant toute décision relative au classement du terrain concerné. La décision finale pourra être d’interdire toutes constructions ou alors de les soumettre à des prescriptions spéciales : en application de l’article R. 123-11 b du code de l’urbanisme les documents graphiques du PLU devront alors faire apparaître les secteurs où les constructions et installations sont interdites ou soumises à des conditions spéciales pour des raisons liées à la protection contre les nuisances ou à des risques technologiques. Par ailleurs, afin d’assister les communes dans leurs choix, les services de l’État doivent fournir à la commune, en application de l’article L. 121-2 du code de l’urbanisme et dans le cadre du « porter à connaissance » pour l’élaboration des documents d’urbanisme, les études techniques dont ils disposent en matière de risque et de protection de l’environnement. Lorsque la commune dispose de plusieurs expertises scientifiques faisant apparaître l’absence de risques pour la santé, elle peut classer les parcelles concernées en zone constructible (par exemple pour le site ou avaient fonctionné l’usine et le laboratoire de Marie Curie : CE, 15 janvier 1999, Les Verts Nogent-Le- Perreux, n° 165119). Finalement, et dans les conditions prévues par l’article L. 541-3 du code de l’environnement, le maire dispose de la faculté de mettre en demeure le producteur ou le détenteur des déchets de dépolluer le site, avec consignation éventuelle de la somme nécessaire auprès du comptable public. Des obligations spécifiques de remise en état du site s’imposent également au dernier exploitant d’installations classées polluantes (cf. art. L. 512-6-1, L. 512-7-6 et L. 512-12-1 du code de l’environnement). Les dispositions d’un PLU classant un terrain pollué en zone constructible sans prévoir de prescription particulière, pourront donc être entachées d’illégalité, lorsque la commune qui avait connaissance de risques importants, n’a pas mis en œuvre les mesures adéquates, par exemple lorsqu’elle classe en zone constructible un terrain pollué afin d’accueillir une aire d’accueil des gens du voyage (CAA Douai, 17 septembre 2009, commune de Pinterville, n° 08DA00632). De manière plus générale, un classement en zone constructible de terrains soumis à un risque important et connu de l’autorité adoptant le PLU constitue une faute susceptible d’engager la responsabilité de cette dernière (CAA Lyon, 21 mai 1991, société d’ingénierie immobilière Sud, n° 90LY00330) et ce dans les conditions habituelles du droit administratif, à savoir une faute, un préjudice et un lien de cause à effet entre les deux. Le fait que l’administré demande à ce que son terrain soit classé constructible alors qu’une pollution est soupçonnée n’exonère évidemment pas la commune de ses obligations en la matière.

Question écrite n° 17964 de M. Yves Détraigne (Marne – UCR)