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Vers une meilleure participation du public en matière d’environnement en 2013

Charte, Participation du public

Un texte capital a été publié au JO du 28 décembre : la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en oeuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement.

Pour mémoire, l’article 7 de la Charte de 2004 prévoit que :

Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. 

Saisi de questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel a constaté à plusieurs reprises la carence du législateur dans la mise en oeuvre de ces dispositions (décision n° 2011-183/184 QPC du 14 octobre 2011, évoquée ici ; n° 2012-262 QPC du 13 juillet 2012 ; n° 2012-269 QPC et n° 2012-270 QPC du 27 juillet 2012, évoquée ici; n° 2012-282 QPC du 23 novembre 2012). La loi du 27 décembre, qui entre en vigueur le 1er janvier 2013, vise à tirer les conséquences de ces arrêts du Conseil constitutionnel et à conférer une portée pleine et entière au principe de participation du public, pilier fondamental du droit de l’environnement.

Nous évoquerons ici les points qui nous paraissent les plus importants.

1. L’extension du champ d’application du principe de participation à l’ensemble des décisions ayant une incidence sur l’environnement

Dans sa rédaction antérieurement en vigueur, issue de  loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010, l’article L. 120-1 était contraire à l’article 7 de la Charte en ce qu’il restreignait la participation du public aux décisions ayant une « incidence directe et significative sur l’environnement« . Le nouvel article prévoit désormais que doivent être soumises à participation les décisions des autorités publiques ayant une « incidence sur l’environnement« , même indirecte et peu significative en toute logique. Il appartiendra au juge administratif de déterminer ce que constitue une incidence sur l’environnement.

Si l’on entre plus dans le détail, il y a lieu de relever que l’article 7 de la Charte a vocation à s’appliquer à l’ensemble des décisions publiques en matière d’environnement (y compris celles des collectivités locales), qu’elles aient une portée réglementaire, sui generis (ex : Déclaration d’Utilité Publique, arrêté portant Zone de Développement de l’Eolien ou déclarant un Projet d’Intérêt Général) ou individuelle. A travers la loi du 27 décembre, le législateur a entendu soumettre à participation les décisions « autres que les décisions individuelles ». Il y a donc un progrès pour ce qui concerne les décisions  sui generis (ou « de son propre genre »). Pour traiter le sort des décisions individuelles dont l’adoption n’est pas précédée par une enquête publique (ex : les dérogations à l’interdiction de destruction des espèces protégées), le Gouvernement est habilité à légiférer par ordonnance (art. 12 de la loi). L’étude d’impact justifie cela par « le délai imparti [par le Conseil constitutionnel, le 1er septembre 2013] et la nécessité de mener une réflexion approfondie sur cette question avec l’ensemble des acteurs concernés ».

A noter dans cette étude d’impact, des statistiques intéressantes sur la participation du public aux concertations menées en 2012 dans les différents domaines de l’environnement (risque industriel, eau et biodiversité, espaces naturels, espèces et patrimoine naturel, agriculture). On note une participation importante – plusieurs milliers d’observations – en matière de pollution des eaux par les nitrates et de chasse. A l’inverse, le domaine de la prévention des risques industriels, technique, suscite très peu de réactions.

2. La prise en compte des observations du public

La participation du public n’a d’intérêt que si ses observations sont prises en compte par le décideur public, ce qui veut tout et rien dire… Dans un esprit louable de transparence, la loi prévoit la modalités pratiques de cette participation du public :

  • une consultation via internet et, suivant des modalités à déterminer par décret, via support papier
  • une durée de concertation de 21 jours au moins
  • la diffusion publique des observations avec une expérimentation, d’avril 2013 à fin décembre 2014 : les observations du public seront mises en ligne au fur et à mesure de leur réception
  • une synthèse des observations et un exposé des motifs de la décision seront rendus publics. La synthèse des observations indique les observations du public dont il a été tenu compte

L’autorité publique devra donc justifier sa décision au regard des observations du public, ce qui constitue un réel progrès.

3. Autres points importants

En marge de l’objet principal de la loi, il faut également relever :

  • En matière de droit minier, les permis exclusifs de recherche (décisions individuelles) ne pourront être délivrés sans participation préalable du public. Cette avancée vise à répondre en urgence à une grave carence du code minier en vigueur. Elle sera complétée par la réforme plus globale du code minier. Le projet de loi en la matière devait être présenté pour fin 2012. Il le sera a priori pour la fin du premier trimestre 2013.
  • La création d’un Conseil national de la transition écologique. Présidé par le ministre chargé de l’écologie, il sera consulté sur les projets de loi concernant, à titre principal, l’environnement ou l’énergie et les stratégies nationales autour du développement durable. Il pourra également s’autosaisir de « toute question d’intérêt national concernant la transition écologique et le développement durable ou ayant un impact sur ceux-ci« . Un décret déterminera les modalités pratiques de ces principes.

Dès demain, il faudra faire vivre ce droit de participation du public à travers des observations informées et perspicaces. Une idée de bonne résolution pour ceux qui en manquent…

Loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement

> Dossier législatif avec notamment l’étude d’impact du projet de loi

Sur ce, bonne année à toutes et à tous!