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Tarifs photovoltaïques : le Conseil d’Etat annule très partiellement les arrêtés tarifaires du 12 janvier 2010 et du 16 mars 2010

Jurisprudence, Photovoltaïque

Dans une décision fleuve qui répond à pas moins de 40 requérants, le Conseil d’Etat  a annulé, le 12 avril 2012, certaines mesures tarifaires.

Il a rejeté l’essentiel des moyens soulevés contre les arrêtés :  violation des principes de non-rétroactivité, de sécurité juridique, d’intelligibilité des normes et de confiance légitime ou encore la violation de l’article 6 de la Charte de l’environnement.

Le moyen tiré de la violation du principe d’égalité a rencontré plus de succès. Sur la base de ce principe, le Conseil d’Etat a partiellement annulé les annexes 1 et 2 de l’arrêté du 12 janvier 2010:

  • l’annexe 1 en tant qu’elle prévoit un tarif privilégié pour les installations bénéficiant de la prime d’intégration au bâti situées sur un bâtiment à usage principal d’habitation, d’enseignement ou de santé (58 c€/kWh au lieu de 50 c€ pour les autres, cf. point 2 de l’annexe 1);
  • l’annexe 2 en tant qu’elle prévoit que par exception, peuvent bénéficier de la prime d’intégration au bâti les bâtiments à usage principal d’habitation achevés depuis plus de deux ans (point 1.1).

De façon symétrique, il a également partiellement annulé l’arrêté du 16 mars 2010 :

  • son article 2, en tant qu’il renvoie aux conditions d’achat de l’arrêté du 12 janvier 2010 ainsi censuré;
  • son article 4 en tant qu’il réitère l’exception au profits des bâtiments à usage principal d’habitation.

Quelles sont les conséquences de l’arrêt?

Au final, l’arrêt n’est pas particulièrement favorable à la filière dans la mesure où il aligne par le bas certains tarifs privilégiés (pour les installations en toiture des bâtiments à usage d’habitation, d’enseignement ou de santé) et menace la pérennité des contrats susvisés déjà signés ou en passe de l’être (hors appel d’offres).

  • Sur les contrats signés

Bien qu’il eut pu le faire pour des motifs d’intérêt général, le Conseil d’Etat a décidé de ne pas moduler dans le temps les effets de sa décision. L’annulation ayant par définition un effet rétroactif, les contrats d’achat déjà signés perdent leur base légale pour ce qui concerne le tarif. De ce fait, ils pourraient être attaqués par EDF et annulés par le juge administratif pour ce qui concerne le tarif d’achat, clause a priori divisible du reste du contrat. Mais il peu probable que l’acheteur désigné par la loi s’engage dans cette voie périlleuse.

  • Sur le dernier arrêté tarifaire du 4 mars 2011

De même que les arrêtés annulés, l’arrêté tarifaire du 4 mars 2011 prévoit des tarifs légèrement plus élevés pour les bâtiments à usage principal d’habitation, d’enseignement et de santé (cf. annexe 1).  On sait désormais que ces tarifs privilégiés sont contraires au principe d’égalité. Cela fragilise l’arrêté et pourrait ouvrir un nouvel épisode judiciaire.

Par souci de stabilité juridique, il serait de bon aloi que le (futur) Gouvernement prenne acte de l’arrêt du Conseil d’Etat en modifiant rapidement les nouveaux tarifs d’achat.

Pour l’heure, s’agissant des projets au tarif privilégiés, le risque juridique est fort.

Outre les éléments ayant conduit à l’annulation partielle, l’arrêté du Conseil d’Etat est riche d’enseignements sur les modalités de détermination des tarifs et les obligations du gestionnaire du réseau de distribution, dont les obligations en termes de traitement des demandes de raccordement sont précisées.

> CE, 12 avril 2012, n° 337528